Discrimination du Diesel Euro 6 : « Attention à l’effet papillon » prévient le CCFA
L’exclusion par Ségolène Royal des véhicules Diesel répondant à la norme Euro 6 de la catégorie 1 de l’éco-vignette aura comme effet pervers d’accroitre les émissions de CO2, expliquent les constructeurs. Un comble à quelques mois de la conférence sur le climat qui se tient à Paris en décembre.
Alors que cette dernière norme a fait converger les émissions polluantes des motorisations Diesel vers celles de l’essence, la classification du gouvernement n’en tient aucun compte.
La pastille verte (la catégorie 1) ne concerne que les véhicules essence des normes Euro 5 et 6. Les véhicules Diesel Euro 6 sont classés en catégorie 2, soit la même que les Diesel Euro 5 et que les véhicules essence répondant à la norme Euro 4.
Si les deux normes Euro 6 ne sont pas totalement équivalentes entre l’essence et le Diesel, elles le sont cependant sur l’essentiel aux yeux des enjeux sanitaires puisqu’elles fixent à 0,0045 g/km la valeur limite pour les particules sans distinction (*).
« Le Diesel doit bénéficier de la pastille verte numéro 1 », a martelé Patrick Blain, le président du CCFA lors d’une conférence de presse. « Nous continuons de discuter avec le ministère pour amender le texte. »
Alors que Carlos Ghosn, PDG de Renault et président de l’ACEA est monté au créneau pour contester cette classification, les constructeurs affutent leurs arguments.
Ces normes qui règlementent les polluants ne disent rien sur les émissions de CO2, autre sujet de préoccupation majeur et qui faisait jusqu’ici l’objet d’une attention exclusive. A quelques mois de la conférence sur le climat, Cop 21, les émissions de CO2 restent un enjeu majeur, et cette classification va à l’encontre de la diminution des gaz à effets de serre.
Moins de Diesel, c’est plus de CO2
« Il y a un risque d’effet papillon pénalisant pour la planète et pour les clients », prévient Patrick Blain qui avance une série de conséquences et en particulier celle de la hausse de la consommation de carburant et donc des émissions de CO2. « Les émissions de CO2 sont strictement proportionnelles à la consommation et la différence est de l’ordre de 15% à l’avantage du Diesel », souligne le président du CCFA.
Décourager l’achat des véhicules Diesel modernes répondant à la norme Euro 6 c’est donc participer à l’achat de véhicules qui seront plus émetteurs de CO2. Des émissions supplémentaires que le CCFA chiffre à 40 millions de tonnes de CO2 en cumul sur le parc d’ici 2030 si l’on supprime les ventes de véhicules Diesel. Pour les clients, cela correspond à un surcoût à la pompe de 20 milliards d’euros, estime le CCFA.
« Nous sommes au rendez-vous des normes que les politiques ont décidé », a dit pour sa part Jacques Rivoal, président de la CSIAM et du groupe VW en France qui souligne l’incompréhension que cette mesure a engendré en Allemagne. « Quand je l’ai expliqué à notre président Martin Winterkorn, il ne m’a pas cru. Les Allemands ne comprennent pas que la France scie la branche sur laquelle son économie est assise », raconte-t-il.
Les constructeurs veulent espérer que cette classification n’est pas définitive. « Nous sortons de discussions de même nature avec la mairie de Paris », a souligné le président du CCFA. L’organisation avait au final salué le plan de la mairie qui prévoit que seuls les véhicules Euro 5 et 6 seront autorisés à circuler dans Paris à partir de 2020, quelle que soit leur motorisation. « Une réponse appropriée aux enjeux de qualité de l’air « , avaient dit à l’époque le CCFA et la CSIAM dans un communiqué commun.
« Le challenge est de convaincre Ségolène Royal », a dit Patrick Blain. « On y croit. »
(*) Pour le CO, la limite fixée est deux fois plus sévère pour le Diesel (0,5 k/km) que pour l’essence (1,00 g/km) tandis que pour les NOX et HC+NOX la tolérance est très légèrement supérieure pour le Diesel (0,08 g/km et 0,17 g/km) que pour l’essence (0,06 g/km et 0,16 g/km).